mardi 31 janvier 2012

Flash Treatment

                                                        Rapport n°1

    Le patient 23 a intégré le département il y a une semaine. Il faisait preuve d'une grande agressivité à l'égard du personnel et des autres patients. Injures, violences physiques et harcèlement moral ont été exprimé à travers sa conduite. Il a fallu l'isoler le temps qu'il s'accommode à sa nouvelle vie.
    J'ai aussi pu constater qu'il était dans un état de dénutrition grave. Il n'a d'ailleurs rien mangé depuis son arrivée. A croire qu'il veut se laisser mourir. Sentiment qui s'est affirmé en l'observant plus attentivement. Toute vie semble avoir quitté son regard, comme si...
Comme s'il n'était plus qu'un pantin en attente de son maître pour être réactivé.
    Par ailleurs, son agressivité ne semble pas exclusivement tournée vers les autres. J'ai pu déceler des traces d'automutilation au niveau des bras et des jambes. Il semble aussi souffrir d'une addiction à certaines drogues. Addiction se caractérisant par un fort état de manque se caractérisant désormais par l'apparition de cauchemars et d'un sevrage.
    Quand il est arrivé pour la première fois, s'il ne tenait pas debout, j'aurai pu croire qu'il était mort.
    Il n'a toujours pas dit un mot, préférant s'enfermer dans un mutisme.
    Les semaines suivantes me permettront, je l'espère, d'en apprendre plus sur son cas.



« J'ai bien envie de violer une ado. Ça me manque ce genre de chose. », qu'il me dit tout en tirant sur sa clope.

Il la jette, l'écrase, en sort une autre de son paquet, l'allume et continue :
« Je me souviens de la dernière. C'était y a dix ans, avant qu'on m'enferme dans ce trou. Elle avait une bon cul. Ça craque a cet âge là. Suffit juste de savoir s'y prendre. »

Il s'arrête de parler et fixe le ciel pendant deux minutes.
Il souffle et me dit : « Faut faire gaffe aux hélicos, ils nous espionnent. Le pire, c'est les satellites, on peut faire que dalle contre eux. Au moins, on est à l'abri dans cette cour. Enfin, pour le moment. »

Il tire sur sa clope, la jette, l'écrase et en rallume une autre.

« J'en étais où déjà ? Ah ouais, les petites salopes que j'aimerais violer. Tu vois, à l'époque, la chasse était beaucoup plus excitante que maintenant. Je choisissais ma cible et j'attendais avec patience le bon moment. Je la choppais dans une ruelle et je lui retournais la chatte. Et si je me sentais de bonne humeur, je lui éclatais le cul. Mais la montée d'adrénaline avant l'action, ça ! C'était divin.
Maintenant avec internet, les prédateurs sexuels ne sont plus que l'ombre d'eux-même.
T'as qu'à te créer un compte sur un forum de minettes et t'as juste à te faire passer pour une de ces fiottes de rockeur. C'est beaucoup trop facile. »

Il crache par terre, renifle un coup et me dit :

- Dis-moi, t'es pas très causant comme type. Une semaine que t'es là et t'as toujours pas pipé un mot. Je connais même pas ton prénom.
- Meth.

Il, c'est Hector.
Un ancien garagiste de quarante balais, enfermé en hôpital psychiatrique, pour avoir violé une demi-douzaine de petites. J'aurais été juge, j'aurais demandé sa mort.
Mais il a décrété qu'il ne pouvait pas s'en empêcher.
Soit-disant, c'est ancré dans son code génétique.
La justice l'a donc jugé fou.

Bien qu'il ne m'ait pas beaucoup vu durant ma première semaine de séjour...

                                                                                          (La faute à l'isolation...)
Hector a décidé de lui-même qu'il serait mon mentor.
Peut-être qu'il cherche à combler un manque affectif.
Peut-être qu'il veut m'apprendre les ficelles du métiers.
Du moment qu'il laisse mon anus en paix, il peut passer le temps à mes côtés.

Ma première semaine dans l'institution fut assez brumeuse.

                                                                                         (La faute à l'isolation...)
Mais pas que...
J'étais enfermé dans mon moi profond pour éviter tout contact avec autrui.
De fait, je n'ai que quelques bribes de souvenirs.
Je me souviens surtout qu'en passant les portes de l'HP, Pirate Jet de Gorillaz, résonnait dans ma tête. La piste de synthé correspondait parfaitement à la folie environnante.
Je me souviens avoir craché à la gueule du psy, d'avoir arraché l'oreille d'un soignant et d'avoir pissé sur les sièges de la salle commune.
C'est puéril, je l'admet.
Je méritais donc ma place en isolation. Le truc, c'est qu'en plus de t'enfermer, ces connards te shootent avec des médocs avec des noms d'un autre monde.
Résultat, on m'a réduit à l'état de légume.

                                                                                        (Merci Damian...)
Me parle plus jamais de lui.
Rester enfermé pendant une semaine, attaché à un lit...
Je pensais qu'on était soigner les gens, ici.
J'ai vite compris qu'il fallait que je fasse profil bas, si je voulais qu'on me foute la paix.
Il faut que je me tire d'ici et vite.
La semaine écoulée, j'ai préféré me murer dans le silence et ils m'ont laissé devenir une des entités de la folie environnante.


                                                          Rapport n°2

    Le patient 23 a enfin quitté le secteur fermé suite à la baisse de son agressivité. Il évolue désormais parmi ses semblables. La lie de la civilisation. Une bande d'attardés, ralentis par leur médication, incapable de changer une ampoule, chacun prêt à se chier dessus au moment le plus opportun.
    Le patient 4, Hector, semble s'être pris d'amitié pour le nouveau venu. Il semble surtout vouloir entretenir une dynamique père-fils, chose qu'il n'avait pu faire avec l'enfant de la dernière femme qu'il a violé.
    Il faudra que je suive leur relation de près. Le patient 23 est toujours fragile, il peut facilement être manipulable.
    Ses nuits sont toujours aussi agités. Il semble ne faire que des cauchemars, il hurle à la mort un seul et même prénom inlassablement : « Lou ».
    Je dois savoir de qui il s'agit.


Dans la salle de garde, l'infirmière tends un petit gobelet.

« Allez, c'est l'heure de vos médicaments. »

Elle sourit, puis elle dit :

 - Allez, on ouvre la bouche et on avale les gélules pour faire plaisir à maman.
 - Ma mère était une pute. Elle suffisamment reçu de plaisir pour toute une vie, connasse.

Putain, faut vraiment que je me tire. Je fous les médocs dans ma bouche.

- N'oubliez pas votre séance avec le docteur et votre groupe de parole. Le premier est en fin de semaine et le second, aujourd'hui, après votre déjeuner. Pour le moment, vous êtes libre.
- Ouais, c'est ça.

Je recrache la merde que j'avais dans la bouche et je ris de l'emploi du mot « libre ».
On passe nos journées à déambuler dans les couloirs sans autre but que d'attendre.
Des barreaux sont vissés aux fenêtres et les portes sont fermées à clés, la nuit.
Libre ? Bizarre d'entendre ce mot quand on est dans une prison.

Il fallait que je trouve Hector, il saurait quoi faire.
Mieux, il m'aiderait.

Par chance, on m'a foutu dans la même chambre que lui à mon retour dans le secteur ouvert.
En ouvrant la porte de la chambre, je vois le violeur en train de se branler en regardant par la fenêtre.

- Ah, c'est toi, Meth ? Regarde la petite là, dehors. Un sacré petit lot.
- Tu peux ranger ta queue ? Il faut qu'on parle.

Hector s’exécute, s'assit sur le lit et attends.

 - Parle. T'as intérêt que ça vaille le coup. J'étais prêt à gicler.
- Ta gueule et écoute-moi.
- Bon Dieu. Tu t'es fais pousser des couilles ? Depuis quand tu parles autant ?
- Je cherche un moyen de quitter cet endroit.
- Tu penses à quoi ?
- Suicide.
- T'es pas sérieux, mon gars ? Tu sais, la mort c'est un peu la récompense de la vie. Je crois que tu remplisses les conditions pour accéder à ce cadeau.
- T'es complètement stone ou quoi ?
- D'après toi ?
- Bon et sinon. Deuxième solution, je m'enfuis. T'aurais une idée ? »

Hector reste perplexe et me dit :

- Pourquoi ? T'es pas bien ici ? C'est le seul endroit sur Terre qui nous accepte tel qu'on est.
- Tu parles ! J'ai rien à faire ici. On m'a emmené ici de force. Faudra que je passe remercier le connard en question quand je serais sorti. Bref, t'as pas idée !
- Honnêtement, j'y ai jamais vraiment réfléchi. Je me sens plutôt bien ici. Et j'ai enfin trouvé un ami.

Je regarde par la fenêtre. La chambre se situe au premier.
Je pourrais passer par la fenêtre mais le grillage...

                                                                                         (Cruciforme ?)
Putain, merci !

 - Dis-moi, Hector. Avec un tournevis, on pourrait retirer le grillage. Tu sais pas où je pourrai en trouver un ?
- Si. Dans la boîte à outils de l'électricien. Il doit changer les ampoules du séjour, mais il la trimbale toujours sur lui. Je vois mal comment lui prendre.
- On lui casse la gueule.
- Vu ta corpulence, mieux vaut que je m'en occupe moi-même. Tu m'en devras une vu qu'avec ce coup, je suis bon pour le secteur fermé.
- T'inquiète.

On sort de la chambre, on marche côte à côte, on arrive dans le séjour.
L'électricien se fait un café. Sa boite est posée sur la table.
Hector arrive par derrière, le choppe, l'étrangle.

- Mais bordel ! Je t'ai jamais demandé de le buter.
- Bof. De toute façon, je suis fou, non ? Et il est pas mort, relax. Il fait juste dodo. En plus, j'aime pas les électriciens. Allez, prends ton tournevis et casse-toi, l'ami.

C'était la dernière fois que je voyais Hector. On dit qu'il s'est pendu dans sa chambre en secteur fermé. Enfin... Il paraît qu'il s'étranglait en se branlant en même temps. Je préfère cette version, perso.

En rentrant dans la chambre, je décide de me recueillir un moment sur Ta photo.
Mais je ne la retrouve plus. Bizarre.
Je dévisse les deux vis du bas du grillage.
Plus que deux.


                                                       Rapport n°3

    Le patient n°4 est mort dans sa chambre, la nuit dernière. On l'a retrouvé pendu, le pénis à l'air libre. Il tenait dans sa main gauche la photo d'une jolie jeune femme. Au verso de l'image, un mot est écrit : « Lou ». Le patient ne dois jamais rien apprendre à ce sujet.
    D'ailleurs, ce dernier ne semble pas être affecté outre mesure par le décès de son compagnon de chambré. Intriguant.


Mes sentiments ont disparu le jour de ta mort. La mort d'Hector ne m'a pas fait beaucoup d'effet.
D'un côté, je le connaissais pas très bien. Ou je me force à penser ça pour éviter la peine.
Cependant, une variable entre en compte désormais. La solitude.
Seul, sans point d'appui, je revis à chaque moment mes souvenirs.
Heureux comme douloureux.
Ces derniers temps, j'ai l'impression d'être devant un épisode best-of d'une sitcom.
Sauf qu'ici la tristesse côtoie le bonheur.
Je passe mes journées à errer dans les couloirs, comme un fantôme rattaché de force à sa demeure.

Le tournevis ne fonctionne pas sur les vis du haut. Je pense pas être encore prêt à me tirer d'ici.

Un jour, la porte d'une pièce que je n'avais jamais vu était ouverte.
Dedans, un patient qui m'était inconnu, était en train de peindre une fresque morbide à base de corps brûlés et d'enfants offerts en sacrifice à des titans vêtu de noir.
J'étais fasciné par cette peinture d'une horreur indescriptible.

- T'inquiète, ils l'effaceront ce soir, comme à chaque fin de semaine. Je peins une fresque et ils repassent en blanc. Et c'est le même refrain chaque semaine. Mais ils me laissent le droit de peindre car c'est tout ce qu'il me reste.
Je m'appelle Raphaël, mais on m'appelle Klimt dans le coin. Non pas que j'ai la prétention de peindre comme lui, mais le chef de service ne connaît que ce peintre.
Et toi, tu es ?
- Personne. Je cherche juste un cruciforme.
- Il y en a un dans ma boîte. Sers-toi.

Raphaël a le même âge que moi, mais est interné ici depuis 10 ans.
Il m'a appris qu'il avait délibérément foutu le feu à ses parents parce qu'ils voulaient l'empêcher de peindre.
J'ai préféré quitter la salle, sans oublier l'objet de la liberté.

Aujourd'hui, c'est groupe de parole. Un des moments de la semaine que j'attends le moins.
Une pseudo cour des miracles entretenu par un clown de l’État.
Mais avant ça, je devais passer un coup de fil à l'enfoiré qui m'a enfermé.
À l'accueil, je décroche le téléphone, je compose le numéro et j'attends.

« Nous sommes désolés, mais ce numéro n'est pas attribué. »

C'est quoi ce bordel ?

                                                                                      (ça sent pas bon...)
Il m'entube et ensuite il disparaît...
Raison de plus de quitter cet endroit et de traquer cet enculé.
Une heure plus tard, le groupe commençait.

On est quatre patients sans compter le psy.
Il y a deux nanas et un autre mec.
Les deux nanas sont pas très chiantes. Le cliché des nanas battues et violées.
Le genre à se scarifier les avants-bras, à sniffer de la coke, à crier à l'horreur de la vie et à s'habiller comme des salopes.
Et après, ça s'étonne de voir la tronche de M. Phallus au coin de la rue.

Le type, par contre, je peux pas l'encadrer. Un sale hippie de merde qui s'est fait griller la cervelle à force de se shooter. Complètement psychotique, le pauvre gars.
Il est persuadé d'être l'envoyé de Dieu le père et qu'il est là pour nous ouvrir l'esprit.
D'ailleurs, chaque semaine, on a le droit à son monologue sur le fait que la société nous annihile, qu'on vit tous des boîtes, des « box » comme les chevaux,
que nous sommes les mules, les pompes à frics des grandes entreprises ;
qu'il faut revenir à une vie plus simple,
que la loi ne protège que les riches,
et que blablabla et ça continue comme ça pendant vingt bonnes minutes.
À force de l'entendre, je le connais presque par cœur son putain de discours
et à chaque fois, je me dis qu'à force de rester ici, je vais finir par y croire.
Au moins, il m'évite de participer.

La séance terminée, je rentre dans ma chambre et tente d'enlever une des deux vis du haut.
Ça marche. Fugue programmée à demain soir.
Je me couche.
Le lendemain matin, je me réveille et je me rends compte que j'ai pissé dans mon lit.
Je régresse, c'est pas bon.


                                                  Rapport n°4
   
    Deux mois ! Deux mois que le patient 23 est arrivé ici de  son plein gré et pourtant il ne montre aucune volonté de coopération.
    Il ne parle pas pendant nos séances ou pendant celles du groupe. Les informations notables, telle que la mort de sa fiancée, sont fort heureusement consigné dans son dossier. Mais le patient ne m'en a toujours pas parlé de lui-même.
    J'espère qu'il changera rapidement d'avis.



On frappe à ma porte. Une infirmière entre.
« Vous avez rendez-vous dans une heure avec votre thérapeute. Vous devriez vous préparer. »

Elle ne fait pas attention à l'état de la grille.
Je me lève de mon lit.

- Mais vous avez mouillé votre lit ! Va falloir changer vos draps.
- Vous inquiétez pas pour ça, c'est inutile.

Je m'habille directement, je me suis pas lavé depuis une semaine, mais ça aussi c'est pas très utile.

Je quitte la chambre. Une heure à tuer avant de palabrer avec l'ami Freud.
Je sors dans la cour, je m'éclate une clope.
À  la fenêtre du premier, les autistes sont en plein atelier.
Aujourd'hui, c'est gymnastique.

Je vais au réfectoire, je prends mon petit-déjeuner, je fous mes médocs dans le gobelet de mon voisin.
Le surdosage lui permettra peut-être d'oublier où il est, si ce n'est déjà fait.

Je me dirige vers le bureau du doc, je frappe à sa porte : « Entrez. »
Je tourne la poignet et entre dans la pièce.
Je m'installe à l'endroit habituel.

Un bureau de psy dégage toujours une forme de chaleur.
Comme si le mobilier criait « Aime-moi ».

Des gros clubs en guise de fauteuils, la possibilité de fumer confirmé par la présence de cendriers un peu partout dans la pièce, une photo de sa famille sur son bureau pour appuyer le côté père symbolique aux yeux des patients.
Derrière le doc, une bibliothèque remplis de gros bouquins reliés, chacun devant peser un bon gros kilos et sensés représenter de façon métaphorique, la connaissance.

Voilà ce que j'ai retenu en deux mois de thérapie, sans avoir dit un seul mot.
Mon psy n'est qu'un papa se pensant tout puissant grâce à sa culture.
Culture ayant l'air d'être du vent.
Beaucoup de gens critiquent l'analyse à cause de la place donnée à la mère.
Enfin, c'est ce que m'a dit Hector.
Moi, je crains rien de ce côté là.
Enfin, je crois.

Le doc se lève, s'installe en face de moi, me regarde.
Il commence toujours ses séances en posant la même question :
« Qui est Damian ? »
Et le désintérêt que j'ai pour cette question me pousse à l'ignorer.

Je regarde par la fenêtre :
- C'est une belle journée qui s'annonce.
- Et pourquoi ça ?
- Elle est annonciatrice de beaucoup de changements.
- Et qu'entendez-vous par changement ?

Je ne réponds pas. Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai envie de lui mentir.
Puis je me dis à quoi bon ?

« Je vais vous raconter une histoire. Je vous prie de ne pas me couper.
Un jour, un enfant naît. Sa mère, camée, faible, préfère l'abandonner.
Il passe les premiers mois de sa vie dans un orphelinat.
Un jour, un couple plutôt sympa décide de l'adopter, de lui torcher le cul quand ses culottes étaient sales, de le scolariser, de le soutenir jusqu'à la fin de sa vie.
Il pensait avoir trouvé un foyer. Quelle blague !
À ses 17 ans, à cause d'un plan foireux de son ami Damian, les flics le choppent et le coffrent pour détention de drogue.
Ses « parents » ne sont jamais venu le chercher et il a fini en maison de correction.
Il aurait pu être n'importe qui. Une star, un chanteur, un génie des maths.
Pourtant cet enfant possède une intelligence médiocre.
Il est faible, mythomane sur les bords et possède la faculté de ne jamais finir ce qu'il commence.
La femme de sa vie est morte par sa faute et cet enfant, lui, a survécu et se retrouve aujourd'hui en face de vous.
Alors que je pleurais sa mort, cet enfoiré de Damian a décidé, de lui-même, de m'envoyer ici.
Un endroit mort où il ne se passe rien,
où la seule activité créatrice est la compulsion masturbatoire des autistes du premier étage.
Merci, Damian. »

Le doc me regarde et dit :

- Qui est Damian ?
- C'est tout ce que vous retenez de mon histoire ?
  Et vous ne comprenez pas pourquoi on vous traite de charlatan ? La séance est terminée.

Je me lève et claque la porte. Vivement l'arrivée de ces changements.


23h. Le service est endormi. Il est temps de passer à l'action.
Je dévisse la première vis du haut, laisse la grille tomber, dégageant ainsi la voie pour atteindre la fenêtre.
Je me trouve à deux mètres de la liberté.
Seul problème la fenêtre n'a pas de poignet.
Pas de chaises à balancer, aucun objet contondant.
Une seule solution, le poing.

En pétant la vitre, une alarme retentit dans la nuit.
Pas grave, je me tire. Adieu.

Je saute du premier étage, m'écorche les genoux en tombant.
Je suis sur la parking avec pour seul vêtement, un pantalon de pyjama.
Je me dirige vers la sortie, la liberté.

Quelque chose brûle au fond de moi.
La joie me pousse à courir. Je pleure et je ris en même temps.
Pour la première fois depuis longtemps, je me sentais vivant.
J'escalade la grille et me retrouve dans la rue.

Seul, complètement hagard, je m'agenouille un moment sur le bitume et je souffle un coup.
Et je ris. Et je me relève.

Exister. Une des plus belles des sensations que j'avais oublié depuis longtemps et que j'ai retrouvé en fuyant l'HP. Mais qui m'a tout de suite été retiré.

Manque de bol, la bagnole que j'attendais, il y a huit mois, a décidé de me percuter ce soir-là.

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